Figura serpentina

"Marque stylistique du maniérisme, la figure « serpentinata » anime, met mouvement et donne grâce à la composition. Elle porte à son paroxysme et finit par détruire le noble balancement du « contrapposto » (un des valeurs les plus sacrés de la renaissance classique) : la dynamique, la fluidité de la ligne en mouvement l’emportent sur la cohérence anatomique. Là encore, l’exemple de Michel-Ange fut décisif. Dans son traité de l’art, Giovan Paolo Lomazzo rapporte: On dit que Michel-Ange donna ce conseil à Marco da Sienna, un peintre qui était son élève : « il devait faire toujours la figure pyramidale, (serpentinata) et multipliée par un, deux ou trois. Il me semble que c’est en ce précepte que consiste tout le secret de la peinture. Car la plus grande grâce et la plus grande beauté que puise avoir une figure, c’est d’avoir l’art de bouger, ce que les peintres appellent fougue de la figure.

Et pour représenter ce mouvement, il n’y a pas de forme plus adaptée que celle de la flamme de feu ». La flamme ondulante et entortillée de la « serpentina » réalise la synthèse spatiale, coordonnée et dynamique d’une série d’oppositions ; c’est un oxymoron visuel, multiplié par deux et par trois. Il emprisonne le mouvement et l’exprime dans l’inertie du marbre et de la toile comme dans le « Génie de la Victoire » de Michel-Ange. La figure serpentine aura suscité une pluie de positions acrobatiques, de raccourcis, d’envols, dont Perino del Vaga ou Pellegrino Tibaldi furent les experts en Italie et Goltzius ou Cornelisz van Haarlem, les interprètes enthousiastes en Europe." source